Entrevue avec Phil Kennard, le nouveau dirigeant de l’équipe canadienne Sail GP Northstar

Voile Québec : Comment avez-vous convaincu Giles Scott de rejoindre l’équipe canadienne? Il était pourtant très bien chez les Britanniques au sein de l’une des meilleures équipes du circuit et il obtenait de bons résultats.

Phil Kennard : Giles était constamment dans l’ombre de Ben Ainslie. Même s’il était le skipper, c’était toujours l’équipe de Ben. Il voulait faire sa marque et mener l’équipe à sa manière. C’était une opportunité pour lui de s’impliquer dans la gestion de l’équipe et d’y jouer un plus grand rôle. Il ne regrette pas son choix et il est également heureux de représenter le Canada, un pays où il a vécu et pour lequel il conserve de l’attachement. Giles, c’est le talent d’une génération. Entre 2014 et 2016, il a gagné toutes les grandes épreuves auxquelles il a participé en Finn. C’est tout simplement incroyable.

VQ : Bruno Dubois, le patron de l’équipe française explique qu’il faut recruter dans le personnel du circuit pour bâtir une équipe gagnante. 

PK : Je n’aime pas recruter au sein des autres équipes, mais oui, les choses sont en train de tourner ainsi. Ça prend un skipper de haut niveau et les meilleurs éléments disponibles. J’ai parlé avec beaucoup de monde, mais il faut prendre en compte le fait que circuit impose une limite budgétaire de 10 millions $ US par saison. Et une lourde amende si on dépasse ce plafond. Ça met toutes les équipes sur un pied d’égalité.

J’aurai bien aimé avoir un second Billy Gooderham sous la main quand il s’est blessé à Auckland, mais je ne l’avais pas. Trouver les bonnes personnes pour les placer au bon endroit constitue l’un des plus grands défis de mon travail. Je ne cesse d’y penser. Les décisions de recrutement se prennent avec le responsable sportif Joe Glanfield, Giles et moi. Mais pour le moment, je considère que nous avons les bons éléments et il n’y a aucun plan pour modifier la composition des navigants. L’objectif est de construire une équipe la plus résiliente possible.

VQ : Comment parvient-on à rentabiliser une équipe et à en faire une opération rentable?

PK : Pour rentabiliser les opérations il faut gagner des courses. C’est l’objectif du propriétaire. Greg Bailey m’a demandé ce dont j’avais besoin pour constituer une équipe gagnante et j’ai pu recruter le personnel dont j’avais besoin.

Les revenus potentiels proviennent de quatre sources. D’abord les commanditaires. J’ai en ce moment des discussions avec plusieurs entreprises. Ensuite, il y a les produits dérivés. L’équipe canadienne est celle qui vend le plus de ces produits dérivés, juste après celle des Etats-Unis. C’est surprenant, mais nous sommes parmi ceux qui drainent le plus de supporteurs de tout le circuit. Viennent ensuite les droits de diffusion télévisuels, mais c’est plutôt mince de ce côté au Canada. Et enfin, nous obtenons des revenus lorsqu’un Grand Prix se dispute au Canada, comme ce fut le cas à Halifax l’an dernier.

VQ : Lorsqu’on compare Halifax, une petite ville par rapport aux autres grandes villes du circuit, on se demande où trouver la rentabilité sur un petit marché.

PK : Lorsque j’ai travaillé sur le circuit de la PGA ( Professional Golfers Association of America ), j’ai appris que les petites villes rapportaient plus que les grandes. Aucun des grands tournois de golf ne se déroule dans une grande ville américaine. Le Grand Prix de New York ne fait pas courir les foules; c’est juste un autre événement dans une fille qui ne cesse d’en recevoir. En revanche, une petite ville procure énormément de visibilité parce que toute la communauté s’y intéresse et converge vers l’événement. Et c’est exactement ce qui s’est passé à Halifax où l’on a eu droit à un spectacle formidable. Nous aimerions beaucoup y retourner en 2026, mais Toronto et Vancouver sont aussi sur la liste des candidates.

VQ : Le circuit compte maintenant douze équipes. Pensez-vous qu’il va encore prendre de l’expansion?

PK : Nous n’avons pas encore navigué à douze bateaux. Les Français étaient absents à Auckland. On verra en Australie. À partir de combien de bateaux y en a-t-il trop? Je pense qu’on approche de la limite. S’il fallait dépasser ce nombre, il faudrait séparer les F50 en deux flottes. Est-ce une bonne idée? Pas sûr.

VQ : Les nouveaux foils en T ont causé beaucoup de difficultés aux équipes. Votre avis à ce sujet.

PK : Le circuit n’a juste pas le choix de continuer à pousser le développement. S’il ne le fait pas, il régresse. Il faut rester à la fine pointe de la technologie. Oui, les bateaux cabraient et se plantaient, mais quel spectacle après tout!

Les nouveaux foils offrent plus de possibilités de réglage. Outre le calage avant/arrière, ils basculent sur le plan latéral. C’est vrai que tout le monde a eu du mal. On est en phase d’expérimentation, on partage les données et on va apprendre à les utiliser. 

Les bateaux sont si proches les uns des autres en termes de performance. La compétition est incroyable. Nous sommes passés de la troisième à la huitième place dans un passage de bouée. Les Australiens ont réussi à survoler le Grand Prix, mais tous les autres étaient vraiment dans un mouchoir de poche. 

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